Histoire
Installé depuis 2011 dans un bâtiment de 4000 m2 conçu spécialement par l’architecte japonais Shigeru Ban, l’histoire du Consortium commença en 1977 au premier étage d’une librairie alternative, puis dans un ancien magasin situé en fond de cour sur la place du marché, dans le centre ville de Dijon, en Bourgogne. De jeunes universitaires y mirent en œuvre leur ambition d’exposer l’art de leur époque : accompagnés d’une poignée de passionnés, ses fondateurs Xavier Douroux et Franck Gautherot, organisèrent des la fin des années 1970 des expositions avec les artistes de l’avant-garde : Christian Boltanski en 1978, Hans Peter Feldmann en 1979, Annette Messager en 1980, Cindy Sherman et Daniel Buren en 1982, Carl Andre et Richard Prince en 1983, Bertrand Lavier et Hans Haacke en 1986… Dès la fin des années 80, le Consortium interrogea la nature et les conventions de l’exposition au moyen de l’exposition elle-même, organisant avec « Une Autre Affaire » une « exposition d’expositions » re-enactant en presque temps réel, à Dijon, les Group Shows organisés aux Etats-Unis par Peter Halley, Bob Nickas ou Steven Parrino ; organisant aussi, avec « Le Choix des Femmes » en 1990, une exposition qui conduisit 4 commissaires masculins à inviter chacun 4 artistes femmes.
Après avoir exposé dans les années 1980 l’art minimal et conceptuel, la Pictures Generation et les expériences abstraites prolongeant les Neo-Geo, Le Consortium a accompagné, dans les années 1990, l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes : des Young British Artists – Liam Gillick, Angela Bulloch, ou Gillian Wearing – à Dominique Gonzalez-Foerster, Maurizio Cattelan, Carsten Höller, Pierre Huyghe, Ugo Rondinone, Jorge Pardo, Philippe Parreno.
Récemment salué par le New York Times[1] comme « The under the radar French Museum that quietly predicts art’s next big thing », Le Consortium a depuis les années 2000 organisé les premières expositions en France de nombre d’artistes américains – Christopher Wool, Kelley Walker, Rachel Feinstein, Josh Smith, Rachel Harrison, Wade Guyton, Joe Bradley, Roe Ethridge, Brian Calvin, Alex Israel, Oscar Tuazon, Larri Pittman – tout en consacrant des expositions rétrospectives à l’œuvre de Lynda Benglis, Dadamaino, Luigi Ontani ou Phillip King.
Commissaire du pavillon Français qui valut un Lion d’Or à Pierre Huyghe à la biennale de Venise en 2001, puis de la 7e Biennale de Lyon en 2003 (« C’est arrivé demain »), Le Consortium participa à la « redécouverte » de l’œuvre de Yayoi Kusama, lui consacrant dès l’an 2000 une grande rétrospective ensuite présentée à la Maison du Japon à Paris avant que de voyager au Danemark, en Autriche, et en Corée, et organisa aussi des expositions à Anyang, à Séoul,… et au Centre Georges Pompidou lorsqu’y fut présentée sa collection.
La collection du Consortium, désormais exposée en permanence au premier étage du bâtiment, compte un peu plus de 350 œuvres. Constituée essentiellement de dons faits par les artistes qui y ont exposé, elle compose une véritable mémoire des expositions y ayant eu lieu. Elle comprend notamment des œuvres de On Kawara, Cady Noland, Dan Graham, Louise Lawler, Allan McCollum, Rirkrit Tiravanija, Oscar Tuazon, Fredrik Vaerslev, Michael Williams, ainsi que d’importants ensembles d’œuvres de Bertrand Lavier, John Armleder, Steven Parrino ou Olivier Mosset.
Au-delà des expositions, les artistes ont fait du Consortium un interlocuteur, un producteur parfois, et ont inspiré dans les années 1980 la création d’une maison d’édition pour éditer leurs catalogues (Les presses du réel) et dans les années 1990 celle d’une société de production de films (Anna Sanders Films) pour organiser leur ambition d’inventer un « cinéma d’exposition ». Aujourd’hui le plus important diffuseur, en France, d’ouvrages consacrés aux arts contemporains, Les Presses du réel est devenu au fil des années une importante maison d’éditions indépendante, publiant aussi bien les écrits du philosophe français du XVIIIe siècle Charles Fourier que des monographies d’artistes ou d’architectes contemporains. Anna Sanders Films a produit les films de « cinéma d’exposition » de Pierre Huyghe ou Dominique Gonzalez-Foerster, mais aussi de cinéma, remportant entre autres la Palme d’Or du Festival de Cannes en 2010 avec « Uncle Boonmee» de Apichatpong Weerasetakul, et connaissant un succès international incontesté avec le récent « le Portrait Interdit » de Charles de Meaux.
Aux côtés de la Fondation de France, Le Consortium est médiateur du programme « Nouveaux Commanditaires », qui offre la possibilité à des citoyens rassemblés autour d’une cause commune de passer commande à un artiste pour exprimer cette préoccupation. De nombreux projets ont ainsi été réalisés, conduisant par exemple Oscar Tuazon a créer une œuvre monumentale à Belfort en hommage aux Commandos d’Afrique, ou Christopher Wool à créer un nouvel ensemble de vitraux pour l’église prieurale de La Charité-sur-Loire, en Bourgogne. Prenant part à l’ambition du classement au patrimoine mondial par l’UNESCO des vignobles de la Côte d’Or, Le Consortium a développé en 2012 avec le Domaine de la Romanée Conti, un projet visant à transformer l’ancienne cuverie des Princes de Conti en un espace d’exposition consacré à l’art actuel et y a organisé depuis des expositions de Bertrand Lavier, Thomas Houseago, Yan Pei Ming, Kim Gordon, Rodney Graham…
Que les fondateurs du Consortium, rejoints en 1995 par Eric Troncy et à partir de 2000 par Seungduk Kim dans l'équipe de direction, puis par Stéphanie Moisdon et Anne Pontégnie, en soient demeurés les directeurs artistiques pendant 40 ans (offrant ainsi, pour une structure publique consacrée à l'art contemporain, un modèle de permanence sans équivalent dans le monde) permit d'établir avec les artistes un dialogue ininterrompu et prolongé souvent tout au long de la carrière de ceux-ci, qui fait du Consortium un laboratoire exigeant et un lieu de débat esthétique dont l'exposition est le langage.
[1] The New York Times, 21 juin 2016.