Carl Andre
Carl Andre
Carl Andre (1935, Quincy, Massachusetts, USA)
Deux œuvres avaient été créées sur place par Carl Andre, lors de son exposition personnelle : une par salle que comptait l’espace à cette époque et disposées entre le double alignement de poteaux métalliques qui les structuraient. Une inscription reprise en 1985 par Reiner Ruthenbeck avec Arche Noah, strictement placée à l’intérieur d’un de ces périmètres.
À même le sol évidemment, les sculptures montraient deux groupes de blocs en béton cellulaire de mêmes dimensions (61 x 20 x 25 cm) ordonnancés sur le mode du jeu de construction. La basse altitude, pour ne pas dire « planéité », était visuellement renforcée par la verticalité des poteaux allant du sol au plafond. Le doublement et surtout l’ampleur des ouvertures du mur mitoyen en permettant une vision simultanée, autorisait la comparaison et permettait la compréhension des rapports qui se jouaient entre les deux pièces. D’abord un rapport de taille : en servant de points de repère, les poteaux mettaient en évidence un subtil décalage entre Outer Piece (composée de 64 blocs de béton) qui, après dilatation, semblait comme contrainte dans une zone devenue presque trop petite pour elle et Inner Piece (comprenant 30 blocs), qui apparaissait au contraire, fort à son aise. D’où cette impression de respiration ressentie dans la considération de l’une puis de l’autre.
Ainsi, Carl Andre s’appuie sur la partition de l’espace et nous oblige, en plaçant une œuvre par salle, à des déplacements constants de l’une à l’autre. A l’inverse Richard Serra, en disposant sept blocs quadrangulaires en acier corten brut (de près de 2 tonnes chacun) selon une configuration circulaire, parviendra en 1985 à unir les deux salles au-delà des données architecturales, à contraindre l’espace jusqu’à en modifier les termes de sa perception. Et si ce dernier crée une tension maximale, enchaîne quasiment les salles l’une à l’autre, Carl Andre, pour sa part, choisit une dialectique de va et vient.
— Stéphanie Jeanjean