Valerie Snobeck
Valerie Snobeck
« (Posture et imposture) » : rien n’y fait, sauf peut-être la peinture. Au moment où il est nécessaire d’affronter les stimulations d’une image qui sait paraître autre chose que ce qu’elle est. « Le tableau te constitue et tu constitues le tableau » (dixit Rémy Zaugg, peintre au pays des peintres). Alors pas d’hésitation : laissez aux autres – artistes y compris – le commentaire, l’analyse contextuelle, le politiquement juste, le cynisme ou l’ironie. Postez-vous et sachez voir.
Avec Snobeck, place à la réciprocité : à moins que vous n’ayez l’intention de vous approprier les derniers reflets qu’elle maintient comme leurre. La « propriété » est un vol organisé socialement qu’il faut comprendre comme un différé. Inversement, la possession réciproque s’invente ici et maintenant : du désordre que provoque l’artiste, elle fait naître la coopération entre l’œuvre et le spectateur. Simple comme «Bonjour monsieur Courbet ! » Voilà pour la posture.
Valerie Snobeck déstructure les matériaux. Elle prend un miroir et par des processus impliquant acides, grattages, incisions, frottages, elle retire le métal au dos de la surface : sur les plaques ne restent que de subtiles traces de leur vies passées. Elle obtient ainsi des surfaces graphiques, embellies d’ombres et de nuances métalliques, jouant par instant de l’opacité, de la translucidité et du miroitement. Elle « dépeint pour peindre » et peut installer un miroir (dont elle a attaqué la texture) pour capturer le mur de coin. Tant mieux pour l’imposture.
Elle ajoute d’autres éléments, certains classiques (le marbre, le bois, la peinture et la céramique), d’autres tirés des technologies contemporaines (le tirage numérique et les processeurs digitaux).
Les interventions de Snobeck attisent le conflit entre alchimie et machine. La déliquescence bouscule l’ordre des informations, mais engage la perception de processus matériels qui déterminent ce que nous construisons et ce que nous créons. Autant de vents contraires qui doivent servir le mouvement en avant pour peu qu’il ne soit pas simplement admis comme une fatalité.
Digital Dramatics Overt Distance, 2010 (partially erased mirror, hardware, peeled prints on plastic, screen protectors) est une œuvre qui vous ravit au moment où vous la saisissez et de suite vous laisse tout à vous sans pourtant vous abandonner tout à fait.
Et cela n’a pas de prix, sauf à ce que le spectateur se sente « politiquement autorisé » à lui en décerner un.
—Xavier Douroux, un dimanche de janvier.